vendredi 3 mai 2013

Cours d'introduction à l'étude du droit


Introduction générale

Ce qui différencie la société humaine des autres espèces animales est la faculté d’inventer des normes d’organisation sociales variées. Le droit est l’une des catégories normatives les plus importantes, que l’homme ait inventées depuis sa création.

Si le droit est lié dans l’imaginaire des gens à l’idée de la sanction, il est à vrai dire plus large que cela. Le droit est partout dans la vie de l’homme. Le droit est présent dans la vie familiale de l’homme, il est présent dans la vie professionnelle de l’homme, il est aussi présent dans la vie privée de l’homme. Il s’agit d’un phénomène omniprésent, qui régit directement ou indirectement tous les aspects de la vie humaine. L’absence d’une règle, ou le vide juridique n’est pas forcément le signe de l’absence du droit. Selon un principe général de droit, ce qui n’est pas défendu est permis. Pour un comportement, « être permis » est une façon d’être juridique. selon la maxime romaine ubi societas, ibi jus. c'est à dire, où il y a une société il y a du droit.

Par ailleurs, la forme écrite des règles d’organisation sociale, n’a jamais été une règle générale. Ainsi, la forme d’organisation normative, n’a jamais été uniforme. Elle a toujours pris des aspects très variées, tout en subissant des évolutions et ce en fonction du degré de développement de la société.

Avant même l’apparition de la codification, les sociétés humaines étaient organisées par des normes non écrites. Le recours à la codification du droit (le droit sous forme écrite) n’était que tardif. Cela était en rapport avec l’élargissement des sociétés humaines, et la difficulté de plus en plus grande de maîtriser les personnes qui y agissent.

Si la norme religieuse, ou la norme morale était d’un effet dissuasif important dans les sociétés primitives, il n’en est pas ainsi avec les sociétés d'aujourd'hui. En effet, les normes non juridiques (morales ou religieuses par ex.) trouvent leur force dans les liens qui se font tisser les membres de la société, grâce à l’unité de conviction et la prédominance d’un certain nombre de valeurs ayant la force suffisante pour faire régner l’ordre.

Dans les sociétés de notre époques, surtout après l’émergence des valeurs de la révolution française (l’individualisme, la liberté personnelle, la liberté de pensée, la tolérance,…). Certaines valeurs unissant les sociétés ont été substituées par une nouvelle vision de la société basée sur la liberté. (le libéralisme et l’individualisme).

Si cette valeur avait affaibli le pouvoir de la religion, elle a eu comme inconvénient d’aboutir au détachement de la société et sa désintégration. D’où le recours à la codification intensive pour remplir le vide laissé par les normes religieuses. 

• La distinction : droit objectif/ droit subjectif

Si l’on prend les grands anciens : les frères MAZEAUD dans leurs Leçons de droit civil, au sommaire de la première leçon, « le mot droit a deux sens : la règle de droit ou droit objectif ; les prérogatives dont une personne est titulaire ou droits subjectifs ».

En effet, le terme « droit » désigne en langue française deux sens : un sens objectif et un sens subjectif. Au sens objectif, on entend par le mot droit l’ensemble des règles juridiques générales permanentes et obligatoires, qui gouvernent les relations entre les hommes et qui s’imposent, si nécessairement avec la contrainte de l’Etat.

Quant aux droits subjectifs, désignent l’ensemble des prérogatives , dont le droit objectif reconnaît individuellement ou parfois collectivement. Ce sont les prérogatives dont jouit une personne dans ses relations avec autrui, sous la protection de l’Etat. On appelle la personne titulaire de ces droits, un sujet de droit. D’où l’appellation, droits subjectifs.

Cela signifie la possibilité pour une personne (sujet de droit) de revendiquer quelque chose en application d’une règle de droit préétablie. C’est-à-dire une règle de droit objectif. Ainsi, dans ce sens, le droit est appelé subjectif, car il est défini par rapport à ses destinataires.

S’il est parfois difficile de faire la distinction entre les deux acceptions du terme droit en langue française, il est plus aisé de la faire en d’autres langues telles que l’arabe, qui distingue clairement entre قانون c'est-à-dire droit dans le sens objectif et حق, c'est-à-dire droit dans le sens subjectif.

- Le rapport entre le droit objectif et les droits subjectifs :

On peut dire que le rôle du droit objectif est un rôle d’encadrement et de limitation pour les droits subjectifs, tout en étant du même coup sa source.

Partie I : Le droit en tant qu’un ensemble de règles : le droit objectif

Chapitre I: Définition et caractéristiques de la règle de droit


Section I : Essai de définition

           Le droit appartient à la famille assez large de notions qui ne sont pas clair et qui cherchent encore leur définition. D’une manière générale, on définit le droit objectif comme étant un «Ensemble de règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s’imposent aux membres de la société », ou « destinées à organiser la vie en société».
        
Cette définition est critiquable dans la mesure où l’absence de règle ne veut pas dire l’absence du droit. La maxime, ubi societas, ibi jus, où il y a une société, il y a du droit, signifie que le droit ne se limite pas à l’ensemble des règles qui organisent la vie en société. Ainsi, définir le droit comme un ensemble de règles, n’est pas semble-t-il suffisant pour englober le phénomène du droit dans son universalité. Par ailleurs, le droit a d’autres sources que les règles écrites telles que la jurisprudence, la coutume…etc.

- Il n’y a pas que les règles de droit qui organisent la vie en société
- Il n’y a pas que les règles écrites qui constituent le droit

Rapport droit/sanction

Certains auteurs ont avancé une autre définition du droit, en se basant sur l’une de ses caractéristiques qui est le fait d’être sanctionnés par l’Etat. Selon les frères MAZEAUD:
« La règle de droit est sanctionnée par la contrainte. – il y a là un caractère spécifique de la règle de droit. Une règle qui ne serait pas obligatoire, ne serait pas une règle de droit ».

M.J.L. Aubert dit mieux lorsqu’il considère que « la caractéristique décisive de la règle de droit consiste en ce qu’elle est une règle à la fois obligatoire et sanctionnée par l’État».

Pourtant la sanction n’est pas inhérente au droit, puisqu’il peut y avoir de règles juridiques sans sanction, soit de facto, soit de jure. La sanction n’est qu’un moyen d’application du droit et non un élément de sa définition.

- En droit international, il peut y avoir des conventions entre Etats, sans pour autant avoir de sanctions en cas de violation de la convention. Du moins, il peut y avoir de sanctions inadéquates avec les violations potentielles .

- En droit interne, il peut y avoir de règles dépourvues de sanction :

o En droit public interne, et particulièrement dans les rapports entre les administrés avec l’administration publique, il n’existe pas de sanction si jamais l’administration viole une règle de droit (absence de facto de la sanction).
Ex. Il est juridiquement impossible d’exécuter un jugement contre une autorité administrative, notamment dans les affaires de détournement de pouvoir ; car elle bénéficie d’une immunité d’exécution à son égard (absence de jure d’une sanction).
Ex. La constitution prévoit que les lois sont promulguées par le Président de la République (art.52). Or, aucune sanction n’est prévue si le Président de la République manque à son obligation de promulgation (absence de jure d’une sanction).

Rapport droit/Etat

Si la plupart des auteurs lient la règle juridique étatique à la sanction, ce n’est pas n’importe laquelle : Il s’agit de la sanction étatique. D’où le rapport étroit entre le droit et l’Etat.

Selon Boris Stark « […] la spécificité de la règle de droit réside dans sa sanction. Son originalité ne tient pas tellement à l’existence même d’une sanction, quelle qu’elle soit, mais à son caractère de sanction socialement organisée ».

Seulement, il est important de signaler que toutes les sociétés ne sont pas étatiques. Il y a des sociétés organisées selon des modèles différents (en tribus par exemple). Les définitions juridiques formelles ne sont pas donc des définitions universelles. Mais, elles correspondent au moins au modèle de société que nous connaissons.

Malgré la diversité des définitions, aucune ne peut être satisfaisante. D’où l’intérêt de dégager les caractéristiques de la règle de droit.

Section II : Les caractéristiques de la règle de droit

La règle de droit se distingue des autres normes de conduite sociale, par 3 caractéristiques : une disposition générale, permanente et obligatoire. Trois éléments que nous allons examiner successivement.

§1) Le caractère général

Une règle de droit est dite générale, c'est-à-dire qu’elle est destinée à être appliquée à tout le monde.

Cela nous amène à dégager les trois remarques suivantes :

- Le caractère général veut dire que la règle de droit doit être appliquée sans discrimination subjective, d’où le principe de l’égalité devant la loi. (article 6 de la constitution : « Tous les citoyens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Ils sont égaux devant la loi ». Cela explique les formules générales et impersonnelles de la règle juridique (ex. : "Quiconque..." ; "Toute personne..."). Toutefois, l’égalité devant la loi ne peut pas empêcher certaines catégories de personnes de bénéficier d’un certain nombre d’avantages, au détriment des autres (ex. les personnes âgées, les députés, les diplomates…etc.), sans que cet avantage ne soit octroyé personnellement ou nominativement : il s’agit d’un ensemble d’avantages fonctionnels et non personnels ; d’où le caractère abstrait et impersonnel de la règle juridique.

Cela veut dire que le caractère général, impersonnel et abstrait de la règle juridique ne s’oppose pas à une éventuelle application restreinte de cette règle. C'est-à-dire à une catégorie de personnes, même s’il s’agit en réalité d’une seule personne.

§2) Le caractère permanent

Une règle juridique est dite permanente, c'est-à-dire qu’elle est édictée afin d’être appliquée pour une durée indéterminée. Ainsi, à côté de la généralité dans l’espace il y a la généralité dans le temps.

Cet aspect nous amène à dégager les remarques suivantes :

- Une règle permanente, ne veut pas dire qu'elle est éternelle: il est possible de le modifier pour s'adapter aux nouveaux besoins de la société.
- Contrairement à l’acte de nomination d’un ministre ou d’un directeur général d’une entreprise publique, ou d’une administration publique, qui prend fin dès son édiction, une règle de droit ne peut prendre fin qu’à la suite de l’apparition d’une nouvelle règle juridique du même niveau ou qui lui est supérieur, édictée par la même autorité ou d’une autorité supérieure, à travers un acte appelé abrogation.
- Certaines règles sont transitoires : elles sont faites pour avoir une validité limitée dans le temps. Cette exception ne nie pas le principe du caractère permanent de la règle juridique. La seule différence est que la durée de vie de la règle transitoire est connue à l’avance, par contre on ne sait pas quand est ce que la règle ordinaire va être abrogée.

§3) Le caractère obligatoire de la règle juridique

A- Signification du caractère obligatoire de la règle juridique

La règle juridique est dite obligatoire, c’est à dire que tout le monde doit la respecter, sous peine d’être sanctionné. On peut noter ici les remarques suivantes :
- En vertu de ce caractère obligatoire il est possible d’imposer la règle juridique par la force de l’Etat : C’est l’Etat à travers ses différents pouvoirs, qui détient en principe le monopole de la sanction.
- Le caractère obligatoire est une caractéristique essentielle de la règle de droit : sans le caractère obligatoire une règle juridique serait réduite à un simple conseil laissé à la discrétion de chacun.
- La règle de droit ordonne, défend, permet, récompense ou punit : même lorsque la règle juridique est permissive, elle ne perd pas son caractère obligatoire. Ex. le don de sang est permis en droit, donc personne ne peut l’interdire.
- La règle de droit est obligatoire dès son apparition (c'est-à-dire dès son entrée en vigueur), jusqu’à son abrogation (نسخ).
- Le recours à la sanction pour appliquer la règle de droit n’est pas systématique. La plupart des règles sans appliquée volontairement.
- Certaines règles perdent de facto leur force obligatoire à cause de l’abandon (الهجران). Abandonner une règle juridique ne veut pas dire perdre sa force juridique. Cette règle pourrait être appliquée même après de longues années d’abandon.

B- La force variable de la règle juridique

Les règles juridiques ne sont pas toutes du même degré de force. Ainsi, il convient de distinguer entre les supplétives et les règles impératives.

1. Les règles supplétives :

Les règles supplétives sont des règles qui ne s’appliquent que si les particuliers n’ont pas écarté l’application, ou s’ils ont décidé de s’y soumettre.

Les règles supplétives sont des dispositions qui ne concernent pas des situations touchant l’intérêt public. Elles concernent plutôt l’intérêt privé. Ainsi, le législateur propose une solution relative à cette situation tout en confiant aux parties la possibilité de la déroger, en s’accordant sur une autre solution.

Ex. l’article 28 de la loi n°83, relative aux échanges et au commerce électronique du 09 août 2000, dispose que « Sauf accord contraire entre les parties, le contrat est conclu à l’adresse du vendeur et à la date de l’acceptation de la commande par ce dernier par un document électronique signé et adressé au consommateur ».

Les solutions des règles supplétives ne sont pas imposées d’une manière impérative, afin de donner une certaine souplesse aux opérations contractuelles.

Elles sont appelée supplétives, car elles ne font que suppléer le silence des parties.

2. Les règles impératives :

Les règles impératives sont des règles auxquelles aucune dérogation n’est permise. Elles sont dites impératives, parce qu’elles ordonnent et défendent. Cela dit, aucune disposition conventionnelle ne peut écarter une règle impérative. Le cas échéant, le contrat serait nul.

Dans le cas d’une loi impérative, l’intérêt en question est un intérêt public, qui dépasse les intérêts privés. Elle est jugée impérative, parce qu’elle est si essentielle pour la société que tout contrat qui la déroge serait nul.

On trouve les lois impératives dans les règles de droit pénal. Le domaine des lois impératives a tendance à se multiplier.

RQ/ Il existe une autre catégorie de règles, proche des règles impératives, mais leur force est plus importante : les règles d’ordre public.

- Les lois d’ordre public sont souvent utilisées comme synonymes des lois impératives. Or, il existe une différence essentielle entre les deux types de lois. Si les lois d’ordre public sont toutes impératives les lois impératives quant à elles ne sont pas toutes d’ordre public.

En cas de litige, le juge peut invoquer lui-même les dispositions d’ordre public, en les imposant aux parties.

- Contrairement aux règles impératives, le contenu des règles d’ordre public est souvent difficile à cerner. Elles sont souvent soumises au pouvoir discrétionnaire (d’un juge par exemple).

C- Les types de sanctions

La règle juridique est sanctionnée de deux façons. La sanction diffère selon qu’on est en présence d’un procès civil ou un procès pénal.

o En matière civile : la sanction se résume à un ordre donné à l’une des parties en litige. Il s’agit en fait, soit d’un ordre de faire ou de ne pas faire. (ex. ordre de payer une dette ou d’une réparation d’un dommage subi par une personne, ordre d’exécuter un engagement,...). Au besoin, il pourra être fait appel à la force publique pour exécuter la décision (généralement commissaire de police, ou huissier notaire).
o En matière pénale : la sanction en matière pénale se distingue de celle en matière civile par le fait qu’elle peut porter atteinte à l’intégrité physique. Il s’agit d’une peine infligée à celui dont le comportement est incriminé par la loi pénale.
§Les sanctions peuvent concerner les biens appartenant aux personnes. (ex. sous forme d’amendes, confiscation de biens…)
§ Les sanctions peuvent aussi s’exercer sur la personne elle-même, touchant son intégrité physique. (ex. peines de privation de liberté (emprisonnement), peine de mort…

RQ/
- Ces peines principales sont souvent accompagnées de peines secondaires telles que le retrait de permis de conduire, fermeture de l’établissement…etc.
- Les sanctions pénales peuvent être accompagnée de sanctions civiles (telles que l’emprisonnement et la réparation des dommages intérêt).
- Il y a trois types d’infractions : la contravention, le délit et le crime :
o L’infraction que la loi punit de peines de police, est une contravention
o L’infraction que la loi punit de peines correctionnelles est un délit : celui qui commet le délit est appelé délinquant.
o L’infraction que la loi punit de peines afflictives est un crime. Ainsi, une infraction est considérée comme un crime si elle porte atteinte au bien-être collectif de la société ou si elle déroge significativement des normes socio-culturelles qui dictent la conduite normale d'une personne.

Selon l’article 14 du Code pénal et 122 du code des procédures pénales: La sanction est prononcée comme suit selon le type d’infraction :

- Contravention : prison 1 jours à 15/ ou 60 dt amende
- Délit : 16 jours -5ans de prison/ ou amende > 60 dt
- Crime : peine de mort ou prison de plus de 5 ans

Conclusion :

Les règles juridiques ne sont pas toutes appliquées de la même manière. Mais la faiblesse dans l’application de certaines règles juridiques ne veut pas dire que cette règle est dépourvue de sanctions. Chaque règle de droit est dotée de sanctions à laquelle il est possible de recourir. Les règles supplétives, même si elles n’ont pas la même force que les règles impératives ou d’ordre public, cela ne veut pas dire qu’elles sont dépourvues de toute force, mais que cette force est seulement moins importante, en laissant une marge de manœuvre aux cocontractants.
D-  Le fondement du droit

Le fondement du droit est l’élément essentiel qui fait que la règle de droit est obligatoire. Dans la théorie générale du droit, on trouve deux fondements du droit : le droit naturel et le droit positif.

Selon la théorie du droit naturel, le fondement du droit se trouve dans les règles de droit naturel. Ce droit naturel peut être soit d’origine divine, soit naturelle, soit rationnelle: 

     Les idées du droit naturel remontent à l’antiquité. Bien qu’il n’y avait pas en Grèce antique d’un droit naturel proprement dit, on pouvait en revanche trouver des lois naturelles, voulues par la nature ou par Dieu, tendant vers le bien et le juste. 

- Aristote est le premier à avoir distingué la loi naturelle de la loi légale. Aristote définit comme naturelle « une règle de justice qui a la même validité en tout lieu et qui ne dépend ni de notre assentiment ni de notre désapprobation ». C’est ainsi que la loi positive doit refléter le droit naturel. 

- Saint Thomas d’Aquin est un religieux, il considère  que le droit naturel est d’origine divine, la loi humaine doit s’inspirer de cette loi divine.
 - Grotius (17ème siècle), a désacralisé le droit naturel, en considérant que son origine n’est pas divine, mais humaine : la raison de l’homme. Ce sont des règles immuables et éternelles. 

      Pendant le 19ème siècle Auguste Compte fonda une nouvelle école appelée l’école positiviste. Selon lui le droit n’est qu’une observation brute des choses. Selon cette théorie, on ne peut parler du droit au sens strict, que s’il s’agit d’un droit positif. Le droit naturel, appartient alors à la sphère de la morale. Le droit naturel désignerait ainsi l’ensemble de principes qui seraient censés devoir inspirer le droit, mais qui ne seraient pas eux-mêmes nécessairement juridiques.  

- Durkheim est allé dans le même sens, en observant le fait social comme des choses. Il estime que le droit de l’Etat s’impose car, la conscience collective de la société l’impose. 

- L.Duguit considère que c’est l’ensemble des consciences individuelles qui fait l’autorité du droit de l’Etat. 

Selon l’école positiviste, le droit un système autosuffisant à lui-même. Selon Hiering la règle devient juridique parce qu’elle émane de l’Etat. C’est lui qui donne à la règle de droit el caractère obligatoire.

Kelsen a expliqué par la théorie normative ce caractère obligatoire de la règle de droit. Il estime que les règles de droit sont un ensemble de règles hiérarchisées, sous forme pyramidale. Le droit est un système auto-suffisant fermé sur lui-même. L’Etat le détermine et le valide par lui-même. Dans cette sphère il n’y a pas de place au droit naturel. 

Section III : Règle de droit et règles voisines

Pour pouvoir définir la règle de droit et de la distinguer des autres règles qui lui ressemblent, il est nécessaire de définir chacune des autres règles voisines et de faire la comparaison avec la règle de droit. Il s’agit notamment des règles d’usage, de morale et de religion.

§1) L’usage :

L’usage désigne des pratiques non écrites, suivies d’une manière constante et concordante et considérées comme normales dans un milieu déterminé.
Ex.: servir les clients dans l’ordre de leur arrivée.

- Différence entre règle de droit et règle de l’usage :
- Au niveau de la source : la source de la règle de l’usage est la pratique sociale ou commerciale, tandis que la règle juridique est adoptée par des institutions officielles
- La règle juridique se distingue de la règle d’usage au niveau du caractère obligatoire : La règle de droit est sanctionnée par la contrainte, à travers l’intervention étatique. Tandis que l’usage est sanctionné par la simple réprobation sociale, c'est-à-dire la protestation sociale, explicite ou tacite. Toutefois, en cas de litige et en l’absence d’un texte juridique, l’usage peut devenir une source de droit. Ainsi, le juge ou même la loi peuvent reconnaitre un usage et l’appliquer en tant que source secondaire de droit.

§2) Règle de droit et morale

La morale est l’ensemble de normes de conduite sociale, qui dictent et distinguent entre ce qui est une bonne ou mauvaise conduite.
- La morale cherche la perfection de la personne, elle tend vers la justice.
Ex. l’obligation de secourir les personnes en danger.

a. La similitude entre règle juridique et morale

- Il peut y avoir un recoupement ou coïncidence entre la règle juridique et la règle de la morale.
Ex. L’obligation de payer ses dettes.
Ex. Le principe de bonne foi est un principe fondamental en droit, qui a un support moral.
Ex. Le principe de la conformité aux bonnes mœurs : il est un principe consacré en droit, qui a une origine morale.
La similitude entre règle de droit et morale, ne veut pas dire que la règle de la morale se confond avec la règle juridique. Il y a eu plutôt absorption de la règle morale par le droit.
Cela dit, les règles de droit et les règles de la morale, s’influencent mutuellement.

b. Différence entre règles juridiques et règles morales.

- La morale a un domaine plus étendu que le droit : le droit réglemente la conduite des hommes en tant qu’ils vivent en société, c'est-à-dire les rapports de l’homme avec son entourage social, par contre la morale se préoccupe non seulement du rapport de l’individu avec la société, mais aussi des devoirs que l’homme s’impose à lui-même. (la morale comprend outre les impératifs sociaux, les impératifs individuels réglementant le rapport de l’homme avec lui-même).

La morale tend à la perfection absolue de l’individu, elle régit même les pensées les plus intimes, elle ne pourra être respectée que par quelques-uns. Par contre le droit est fait pour assurer la paix et l’ordre au sein de la société.

- Les sources de la morale et du droit sont différentes : pour la morale, la source se trouve essentiellement dans l’intuition et le bon sens individuels, ainsi que dans la conscience individuelle et collective. La morale religieuse est aussi une source importante de la morale. Le droit quant à lui, trouve sa source dans la volonté exprimée de certaines autorités ayant une légitimité pour faire la loi.
- La sanction dans les règles morales est de type psychologique : le remord. Tandis que la sanction dans les règles juridiques est plutôt de type social, imposé par l’Etat.
- Personne ne conteste la morale, par contre il est possible de contester une règle juridique. Car, la règle morale est produite spontanément, alors que la règle juridique est née à travers des institutions politiques, travaillant sur la base d’un programme politiques.

§3) Règle juridique et règles religieuses

La religion est l’ensemble des règles qui définissent les rapports de l’homme avec Dieu et avec la société.
RQ/ Dans certaines sociétés, il n’y a pas de distinction entre règles juridiques et règles religieuses (ex. Arabie saoudite). Ainsi, les règles religieuses dominaient la totalité de la vie sociale.

a. Similitudes entre règles juridiques et règles religieuses

- En plus de la recherche de la paix spirituelles, les règles religieuses cherchent aussi à réaliser la paix sociale. Ainsi, les commandements religieux peuvent être en osmose avec les règles juridiques, notamment lorsque le législateur adopte ces normes.
(Ex. l’interdiction de tuer, de voler, l’interdiction du mariage homosexuel…)
Rq : Lorsqu’on interdit ce type de mariage, on n’est pas en train d’appliquer une règle religieuse, mais plutôt une règle juridique, qui a adopté une norme religieuse. Autrement dit, il s’agit là d’un simple cas d’intersection entre les deux types de normes.

b. Divergences entre normes juridiques et normes religieuses

- Divergence au niveau de la source : la source de la règle juridique est humaine, tandis que la source de la règle religieuse est le plus souvent d’origine divine.
- Divergence au niveau de la sanction : la violation d’une règle juridique est sanctionnée généralement par les tribunaux, tandis que la règle religieuse est sanctionnée en cas de violation, essentiellement, dans l’au-delà.
- La règle de droit peut être en conflit avec une règle religieuse :
o Ex. de règle de droit anti-religieuse : certains pays communistes ont pendant la période de leur gouvernance créé des ministères d’athéisme pour combattre toute pratique religieuse.
De même on trouve dans notre code de statut personnel des dispositions qui interdisent la polygamie, alors que l’Islam l’autorise.

Chapitre II : Les matières et les sources du droit objectif

Section I : Les matières du droit

La distinction entre le droit public et le droit privé domine l’ensemble du droit. Cette distinction remonte à l’époque romaine ; lorsque le droit public était d’origine royale, alors que le droit privé était d’origine populaire, basé essentiellement sur la coutume.
Cette distinction a fait l’objet d’une controverse, basée sur un conflit idéologique. Le droit public passait pour rechercher l’intérêt public et basé sur la contrainte; alors que le droit privé avait pour objet les intérêts privés et considéré comme un droit de liberté.
Malgré cette division le développement des rapports sociaux, a abouti à une diversification progressive des matières de droit. Le XXème siècle a connu un développement particulier du droit, grâce à une spécialisation plus claire des matières de droit. Cela est dû essentiellement à l’évolution technologique et scientifique et l’évolution du rôle de l’Etat.

Toutefois, le droit avec ses diverses ramifications, peut être classé en trois grandes catégories : le droit public, le droit privé et les droits mixtes.

§1) Le droit public

Le droit public est celui qui :
- Régit les rapports de droit dans lesquels interviennent l'Etat (ou une autre collectivité publique) et ses agents.
- Régit l'organisation de l'Etat et des collectivités publiques, ainsi que leurs rapports avec les particuliers. Il contient les règles d'organisation de l'Etat et celles qui régissent les rapports entre les particuliers et l'Administration.
Le droit public se subdivise aussi en plusieurs branches. Il comprend principalement :

- Le droit constitutionnel : Il fixe les règles de base d'organisation de l'Etat. Plus que tout autre droit il mêle des éléments juridiques avec des éléments politiques.
- Le droit administratif : Il réglemente la structure de l'Administration et ses rapports avec les particuliers. Il est appliqué par une juridiction spécialisé (le Tribunal administratif).
- Les finances publiques et le droit fiscal : qui réunissent les règles régissant les dépenses et les recettes des collectivités publiques,
- Les libertés publiques : Elles définissent les divers droits de l'individu dans la société et les modalités de leur protection.
- Le droit international public : appelé aussi le droit des gens, contient les règles applicables dans les rapports des Etats entre eux et définit l'organisation, le fonctionnement, la compétence et les pouvoirs des organisations internationales (Ex. : O.N.U.). (S’applique aux sujets de droit international).

§2) Le droit privé

Le droit privé est celui qui régit les rapports des particuliers entre eux. Ces particuliers peuvent être des personnes physiques ou des personnes morales.
Définition : Le droit privé est celui qui régit les rapports entre particuliers ou avec les collectivités privées, telles que les associations, les sociétés et qui assurent prioritairement la sauvegarde des intérêts individuels.
Le droit privé comprend deux matières principales : le droit civil et le droit commercial :

a. Le droit civil

Occupe une place privilégiée : il a une valeur générale et donne les principes généraux. L’importance du droit civil réside essentiellement dans son étendu et son perfectionnement. Le droit civil constitue le droit commun. Cela signifie qu'il s'applique, en principe, à tous les rapports de droit privé, sauf si un droit spécial indique autrement. Cela veut dire que toutes les autres branches de droit sont des droits d’exception. Ainsi le droit maritime ne s’applique que dans le domaine maritime, par contre le droit civil s’applique à tous les domaines. Il est le tronc commun de tous les droits. Cette fonction particulière s'explique par le fait que le droit civil est la branche la plus ancienne du droit.
A l’époque romaine, on distinguait entre le jus civile, qui s’appliquait aux citoyens et le jus gentium qui s’appliquait aux étrangers. Le droit civil régit essentiellement, le droit des obligations (contrat-responsabilité civile) et les droits réels. Les principales règles de droit civil sont regroupées dans le Code des obligations et des contrats, ainsi que le code des droits réels.
RQ/ Dans certains pays, notamment occidentaux, les droits familiaux font partie du droit civil ; alors que dans les pays arabes et musulmans, ces droits font partie du droit du statut personnel.

b. Le droit commercial :

Faisant partie, d’abord, du droit civil, puis devenu indépendant; le droit commercial contient les règles, dont l'application est réservée, soit aux particuliers qui effectuent des actes de commerce, soit aux commerçants. Il régit donc aussi bien les sociétés constituées pour la réalisation d’opérations commerciales, que le fonds de commerce du simple commerçant ou encore des actes de commerce (actes de vente et achat, de transport, ..).
Bien qu’il existe beaucoup de points communs avec le droit civil (ex. conditions de formation des contrats), le droit commercial se distingue par un certain nombre de règles spécifiques à la vie des affaires. Les principales règles de droit commercial, sont codifiées dans le Code de commerce.
RQ/ Certaines règles se sont détachées du droit civil et du droit commercial, pour constituer une branche autonome de droit de nature mixte. Ex. le droit de la propriété intellectuelle, le droit des assurances…etc.
Le droit international privé fait aussi partie du droit privé, mais avec des éléments d’extranéité. Il régit les rapports des particuliers entre eux lorsqu'il existe un élément étranger. Il s’agit d’un droit qui détermine le droit applicable à ce genre de rapports, ainsi que la juridiction compétente.

§3) Les droits mixtes

Certaines matières de droit font appliquer des règles de droit public, ainsi que des règles de droit privé. Parmi les matières de droit mixte, on site notamment :

Le droit pénal : Il a pour principal objet de définir les comportements constitutifs d'infractions, et de fixer les sanctions applicables à leurs auteurs.
Le droit pénal a un lien étroit avec le droit public. Ainsi, en plus de la répression, le droit pénal cherche à prévenir les crimes. Le procès pénal n’oppose pas deux particuliers, il oppose le délinquant à la société. Ainsi, même si la victime n’intervient pas (pour mort de la victime par exemple), le procès se déroulera normalement entre le délinquant et le ministère public (النيابة العمومية). C’est pourquoi on dit que le procès pénal est de type inquisitoire (le juge d’instructionقاضي التحقيق  détient des pouvoirs étendus, afin de lui permettre de rechercher les preuves. Le système anglo-saxon est caractérisé par un aspect accusatoire, puisque la recherche de la vérité est exercée concurremment par l’accusation (procureur de la république et police) et par la défense (la victime et ses avocats, d’où le rôle des détectives privés)).
L’essentiel du droit pénal est codifié dans le code pénal. Traditionnellement, le droit pénal est rattaché au droit privé. Puisqu’il est enseigné par les professeurs de droit privé ; d’autant plus que le but essentiel de ce droit est de sauvegarder les intérêts des individus contre les atteintes pénales à leurs droits.

- Le droit processuel : Il s’agit d’un droit qui regroupe la procédure civile (droit judiciaire privé), la procédure pénale et la procédure administrative.
Cette matière détermine les procédures à suivre. Elles ont ainsi un rapport avec le droit public, puisque la procédure a pour but l’organisation d’un service public (celui de la justice). En plus, elle a un rapport avec le droit privé, puisqu’elle est traditionnellement enseignée par des professeurs de droit privé.
Aujourd’hui, on constate une tendance de plus en plus forte vers une processualisation du droit. Ainsi, le contenu de la loi porte moins sur la substance, que sur la manière de faire. C’est en quelque sorte comme la certification de type ISO.

Le droit social : regroupe le droit de travail, et le droit de la sécurité sociale.
    o Le droit de travail: recouvre l'ensemble des règles qui définissent la condition des travailleurs salariés. Il régit la prestation de travail; sa rémunération, la représentation collective des salariés, le droit de grève, les pouvoirs de l'employeur, le licenciement des salariés, etc.
    o Droit de la sécurité sociale : Il réunit un ensemble de règles destinées à s'appliquer principalement aux travailleurs pour les garantir contre divers risques sociaux (la maladie, les accidents du travail, le chômage), mais aussi pour jouer un rôle de solidarité par l'octroi de prestations pour la charge de leur famille.

Le droit social est un droit mixte. Il a un rapport traditionnel avec le droit privé, puisqu’il régit des rapports privés (employeur/ employé). Il a aussi un rapport avec le droit public, puisqu’il fait intervenir l’Etat à travers des institutions telles que l’inspection du travail.

Section II : Les Sources du droit objectif

Les sources du droit sont les éléments de référence qui constituent l’ensemble des règles juridiques dont le juge fait appel en cas ou un litige se présente devant lui.

Les sources de droit peuvent être soit matérielles soit formelles :

• Les sources matérielles : Elles sont constituées de l’héritage historique, idéologique et religieux, que ce soit juridique ou extra-juridiques et qui a une influence directe ou indirecte sur le contenu des règles juridiques applicables. Autrement dit, il s’agit des causes profondes qui ont influencé la formation de la règle de droit.
Ex. La Charia islamique est une source matérielle du droit tunisien.
Ex. Le droit romain est une source matérielle du droit français.

• Les sources formelles : Elles sont les règles juridiques qui se forment sur la base des sources matérielles (usage, morale, religion…) et qui ont été consacrées par le législateur en tant que droit objectif, positif, sanctionné par les tribunaux.

§1) Le droit naturel face au droit positif


Existe-t-il une norme de droit indépendante des conventions particulières de chaque société ? Y a-t-il un droit supérieur au droit positif ? Si on imagine que dans l’instant l’Etat avec tout son appareil législatif judiciaire et exécutif s’évanouisse peut-t-on tuer, voler et faire tout ce qui était interdit par la loi ? 

La révolution tunisienne nous a donné un exemple vivant de cette situation. D’un coup, on vu l’Etat s’affaiblir jusqu’à presque s’évanouir. Pourtant, les citoyens dans leur écrasante majorité ont pu garder l’ordre et ont même constitué des comités de quartiers qui ont veillé à l’établissement de l’ordre dans leurs quartiers. Cela prouve qu’il y avait un autre type de droit autre que celui posé par l’Etat qui s’appliquait. Cela illustre parfaitement le droit naturel (jusnaturale) développé depuis l’antiquité par le jusnaturalisme.

Si le droit naturel  existe incontestablement, sa place dans le corpus juridique est tantôt confirmée, tantôt mise en cause. La théorie de droit naturel considère que les règles positives doivent être le reflet du droit naturel, parce qu'elle lui sont supérieures. Tandis que la théorie positiviste néglige la place du droit naturel et ne reconnais que le droit positif. 

Hans Kelsen est beaucoup plus que tout autre a consacré cette théorie dans sa fameuse pyramide, qui organise les règles de droit d'une façon hiérarchique. Toutefois, on entend de temps en temps des voies qui rappellent l'importance des règles de droit naturel, notamment pour contester certaines règles positives constitutionnelles ou infra-constitutionnelles. par ailleurs, et malgré son opposition au droit naturel, Kelsen était obligé d’introduire du droit naturel, à travers la norme suprême qui vient au dessus de sa pyramide, appelée la Grundnorm.
§2) Les sources principales du Droit positif

On distinguera dans ce paragraphe entre trois catégories de sources principales, à savoir : Les sources supra législatives, les sources législatives et les sources infra législatives.

A- Les sources supra législatives :

Il existe deux principales sources supra législatives : la constitution et les conventions internationales.

a. La constitution :

1. Définition

C’est le texte fondamental de l’Etat. Selon la définition formelle, la constitution se limite à l’ensemble de règles revêtant une forme spéciale, consistant en un document écrit solennellement adopté, par une autorité, généralement supérieure à celle des lois et ayant une procédure de révision plus lourde.

La constitution est le texte qui organise le rapport entre les différents pouvoirs de l’Etat, donc il organise le fonctionnement de l’Etat. 

Selon la définition matérielle, il peut y avoir des règles constitutionnelles sans qu'il y ait forcément une constitution formelle. Ainsi en Grande Bretagne par exemple, il n' y a pas un texte de constitution, mais des règles parfois écrites (magna carta, Habeas corpus...) ou non écrites, qui organisent le mode d'exercice et d'attribution du pouvoir. 

b. Les Conventions internationales

Selon l’article 2 de la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, un traité est tout « accord international conclu par écrit entre Etats et régi par le droit international, qu’il soit consigné dans un instrument ou dans des instruments connexes et quelque soit sa dénomination particulière ».
B- Les sources législatives : les lois

Les sources législatives comprennent les textes de lois adoptés par le pouvoir législatif.

Définition

 Selon la définition matérielle, le terme loi, englobe toute règle juridique à la quelle le juge se réfère lors d’un litige. Cela comprend entre autres, les règles émises par le Parlement et celles émises par le pouvoir exécutif, telles que les décrets et les règlements. Elle englobe aussi les règles assimilées. C'est-à-dire, la coutume et les principes généraux de droit. Autrement dit, elle comprend toute règle à caractère général abstrait permanent et obligatoire. Cette définition exclue les jugements et les contrats.

Au sens formel, le terme loi comprend l’ensemble des textes votés par le pouvoir législatif. cela vient par opposition aux autres textes (les décrets, les arrêtés…). Il existe plusieurs catégories de lois. Les lois ordinaires et les lois organiques, loi constitutionnelle et lois référendaires.

a. Les lois organiques et les lois ordinaires

1. Les lois organiques

Les lois organiques sont des lois qui définissent l’action et le fonctionnement des institutions et organes publics.

Les lois organiques sont peu nombreuses par rapport à l’ensemble des textes adoptés par le Parlement. L’objectif des lois organiques est de rendre applicable les dispositions constitutionnelles. Ainsi, elles fixent les modalités d’organisation et de fonctionnement des pouvoirs publics. La constitution ne donne que les principes généraux. Pour les rendre applicables, il faut faire adopter des lois organiques, qui vont donner un aspect concret à ces principes. Ces mêmes lois organiques ont besoins des lois ordinaires pour organiser les détails. Quant aux lois ordinaires elles s'occupent des détails et des questions ordinaires.

Ex de loi organique: La loi organique des communes, loi organique relative aux conseils régionaux. 

Mode d'adoption:

Selon l'article 4 de la  Loi constitutionnelle N°6-2011 du 16-12-2011 relative à l'organisation provisoire des pouvoirs publics, les loi organiques sont adoptés à la majorité absolue de ses membres (50%+1). Alors que l'adoption des lois ordinaires, se fait à la majorité des membres présents, à condition que les membres présents ne soient pas inférieurs au tiers des membres de l'ANC (Assemblée Nationale Constituante).

b. Les lois constitutionnelles et les lois référendaires

Les lois constitutionnelles sont une autre catégorie rare de sources législatives. Elles sont adoptées, en vue de réviser la constitution .

Selon l’article 77 de la constitution, l’adoption de la loi constitutionnelle se fait à la majorité des deux tiers des membres, en deux lectures. La seconde lecture intervient trois mois après la première.

Lorsque la loi exige un référendum (article 2 et 47 de la constitution) , on parle alors d’une loi référendaire . Ainsi, le président de la République soumet le projet de loi au peuple, après son adoption par la chambre des députés, à la majorité absolue de ses membres au cours d’une seule lecture. (Vérifier dans les textes art 47 et 77 de la constitution).

Depuis son adoption le 01 juin 1959, la constitution tunisienne a connu 14 révisions constitutionnelles, donc l’adoption de 14 lois constitutionnelles. La dernière en date est celle du 01 juin 2002.

Il est à noter que les lois ordinaires, organiques et constitutionnelles n’entrent en vigueur qu’après leur promulgation par le Président de la République dans un délai maximum de 15 jours (voir article 52 et 78 de la constitution).

C- Les sources infra législatives du droit

On dénombre quatre sources infra législatives : les décrets-lois, les décrets et les arrêtés et les circulaires.

a. Les décrets-lois. (المراسيم) - (Appelés aussi ordonnances en France)

Définition :

Les décrets-lois sont des actes émanant du Président de la République lui permettant d’intervenir dans le domaine législatif pour une raison spécifique, objet spécifique et durée limitée. Ils doivent être soumis à une ratification postérieure par le pouvoir législatif.

Il est à noter que les décrets-lois constituent des mesures exceptionnelles dont le Président de la République fait recours pour assurer la continuité de l’Etat conformément à l’article 41 de la Constitution.

(« Le Président de la République…veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels et assure la continuité de l’Etat… » (Art. 41 Cst.).

Il existe selon la constitution tunisienne, trois hypothèses dans lesquelles le Présidents de la République peut intervenir pour édicter des décrets-lois.
- Cas de l’habilitation,
- Cas des vacances parlementaires,
- Cas de dissolution de la chambre des députés.

1- Cas de l’habilitation (التفويض)

Selon l’article 28 de la Constitution «…La Chambre des députés et la Chambre des conseillers peuvent habiliter le Président de la République, pour un délais limité et en vue d’un objet déterminé, à prendre des décrets-lois qu’il soumettra, selon le cas, à l’approbation de la Chambre des députés ou des deux Chambres, à l’expiration de ce délai… ».

Il est important de noter que l’habilitation donne au décret-loi la valeur provisoire d’une loi. Toutefois si le Président de la République dépasse les pouvoirs qui lui sont attribués par l’habilitation (l’objet de l’habilitation, durée de l’habilitation), il risque de voir le décret-loi rejeté lors de son approbation postérieure par le pouvoir législatif.

2- Cas des vacances parlementaires (عطلة برلمانية).

Selon l’article 31 de la Constitution « Le Président de la République peut, pendant les vacances de la chambre des députés et de la Chambre des conseillers, prendre des décrets-lois qui sont soumis, selon le cas, à l’approbation de la Chambre des députés ou des deux chambres, au cours de la session ordinaire qui suit les vacances ».

RQ/ L’intervention du Président de la République est limitée dans le temps : la durée (la période des vacances des deux chambres : mois de juillet et août). Comme le cas de l’habilitation, le décret-loi adopté pendant les vacances parlementaires doit être approuvé par la chambre concernée pendant la session ordinaire d’après les vacances.

3- Cas de dissolution de la Chambre de députés (حل مجلس النواب)

Selon l’article 63 de la Constitution «…En cas de dissolution prononcée dans les conditions de l’alinéa premier du présent article, le Président de la République peut prendre des décrets-lois qui doivent être soumis par la suite à la ratification de la chambre des députés et de la chambre des conseillers selon le cas… ».

Pour les mêmes raisons que les cas de l’habilitation et des vacances parlementaires, le Président de la République intervient pour combler le vide laissé par la chambre de députés en cas de dissolution .

Egalement, les décrets-lois doivent être approuvés par la suite par les chambres parlementaires concernées.

b. Les décrets. (الأوامر) - (appelés en France règlements ou décisions)

Définition :

Un décret est un acte exécutoire à portée générale ou individuelle signée soit par le Président de la république soit par le Premier ministre.

Le décret peut constituer dans certains cas un instrument entre les mains du Président de la République, avec lequel il exerce un pouvoir réglementaire, parallèle au pouvoir législatif exercé par le Parlement.

Les décrets peuvent être soit individuels, soit règlementaires : Les décrets individuels, ont des effets juridiques sur des individus bien déterminées, en raison de leurs noms. (Nommer une personne par exemple (Art. 55 de la constitution)) ; tandis que les décrets réglementaires ont pour objet de produire des règles générales permanentes et obligatoires, soit pour appliquer une loi, soit pour créer des normes, autonomes parallèles aux lois, selon l’article 35 de la constitution.
Ainsi, seuls les décrets réglementaires qui peuvent produire des règles de droit. Les décrets individuels épuisent leur force juridique dès leur édiction et n’ont pas, ni le caractère général, ni le caractère permanent, tandis que le décret réglementaire a toutes les caractéristiques d’une règle juridique.

c. Les arrêtés. (القرارات)

Déf. : Les arrêtés sont des actes qui peuvent émaner du Premier ministre, des ministres ou mêmes par les autorités régionales ou locales, telles que les gouverneurs, les chefs de municipalités…

Les arrêtés peuvent être, soit individuels, soit règlementaires. Ils sont soumis aux textes supérieurs (décrets, décrets-lois, lois, conventions internationales et constitution). A cet égard, c’est le tribunal administratif qui est chargé de contrôler la légalité de ces actes.

d. Les circulaires (المناشير)

Les circulaires, sont des textes administratifs internes. Elles sont prises sous forme d’instruction de service. Leur but est d’expliquer aux agents de l’administration la façon avec laquelle il faut appliquer les textes juridiques, qui les concernent : Les circulaires sont donc des textes édictés par les supérieurs hiérarchiques sous forme d’instructions ministérielles et des mesure de service, afin d’indiquer aux fonctionnaires comment interpréter ou appliquer une loi ou un règlement.

Bien que les circulaires soient des textes internes de l’administration, leur impact peut s’étendre aux citoyens ordinaires, en dehors de l’administration. Cela est vérifié notamment dans les cas où leur application s’impose à des fonctionnaires qui sont en contact direct avec les citoyens.

§3) Le rapport hiérarchique entre les sources principales du Droit

La hiérarchie des normes est une idée chère à H. Kelsen qui considère que l’ordre juridique n’est pas un système de normes juridiques placées toutes au même rang. Il est plutôt constitué d’un ensemble de règles superposées, de façon à ce que toute norme inférieure tire sa force et sa légalité de la norme qui lui est supérieure. Au sommet de la hiérarchie se situe la constitution.

Il existe des techniques de contrôle du respect de cette hiérarchie. Parmi ces techniques, on cite notamment le contrôle de la constitutionnalité des lois et le contrôle de la légalité des actes administratifs.

Le contrôle de la constitutionnalité se fait soit à travers un organe politique (ex. le conseil constitutionnel en Tunisie) ; soit à travers un organe juridictionnel (ex. la Haute cour aux USA).

Il est aussi possible d’effectuer ce contrôle par voie indirecte, dite par voie d’exception. Cela se fait à travers les juridictions ordinaires à l’occasion d’un litige en cours. Cette technique ne permet pas d’annuler une loi pour inconstitutionnalité, mais seulement de ne pas l’appliquer pour l’affaire en cours.

Le contrôle de la légalité des actes administratifs se fait à travers une juridiction administrative (ex. le tribunal administratif). Cette technique permet d’annuler un acte administratif (décret, arrêté ou même une circulaire), s’il s’avère que l’acte en question a violé une règle supérieure.

Section II : Les sources accessoires du Droit

Les sources accessoires du droit sont au nombre de trois (3) : La coutume, la jurisprudence et enfin la doctrine.

§1) La Coutume

A- Définition

La coutume est un ensemble de pratiques répétées, considérées comme étant obligatoire. Elle est aussi l’ensemble de règles juridiques non écrites considérées comme obligatoires par le groupe social.

D'après Jean Carbonnier « la coutume est une règle de droit qui s'est établie, non par une volonté étatique émise en un trait de temps, mais par une pratique répétée des intéressés eux-mêmes ».

La coutume fait partie du droit, mais un droit qui s'est formé par l'habitude. C'est-à-dire par la pratique et la répétition de certains actes.

Différence loi/ coutume :

La formation des coutumes est très lente et de nos jours elle joue un rôle un peu moins important qu'autrefois. Aujourd'hui, les mutations sociales et culturelles sont en effet beaucoup plus rapides.

B- Eléments constitutifs de la coutume

La coutume est constituée de deux éléments inséparables. L’élément matériel et l’élément psychologique.

- un élément matériel : il s'agit de l'habitude prolongée de la masse des citoyens de se conduire de telle ou telle manière.

- un élément psychologique : (c’est la conviction de la population, que la pratique répétée est obligatoire). Il s'agit de la conviction dans le caractère obligatoire de l'usage.

C- Force obligatoire de la coutume

Etant donné que la coutume est la source matérielle principale de la loi, sa valeur juridique est non négligeable. Ainsi, la coutume a autant de portée que la loi, dans les rapports avec les parties. Elle n'a cependant, en principe, qu'une valeur interprétative, de telle sorte qu'elles peuvent y déroger expressément.

Elle cesse d'autre part de s'appliquer là où elle se heurte à une loi impérative contraire, sauf exception.

La valeur juridique de la coutume dépend souvent de la reconnaissance qui lui est faite, soit par le législateur, soit par la jurisprudence.

D- Le rapport entre la coutume et la loi

En principe une coutume ne peut pas contredire une loi. Ainsi, si la coutume peut compléter la loi, interpréter la loi, mais elle ne peut, en revanche, la contredire. Ainsi, l’article 543 du C.O.C. dispose que « la coutume et l’usage ne saurait contredire la loi lorsqu’elle est formelle » .

Le rôle de la coutume se limite à deux :

Un rôle interprétatif (en cas d’ambigüité de la loi)
Rôle complémentaire : en cas de lacune de la loi

§2) La jurisprudence

A- Définition

La jurisprudence est l’ensemble de solutions apportées par les décisions de justice, notamment lorsque la loi est lacunaire ou ambigüe. (Elle intervient, notamment pour l’interprétation de la loi, quand celle-ci est ambigüe ou même pour la création du droit, lorsqu’il est lacunaire).

Lorsque les décisions de la jurisprudence sont rendues par une cour, elles sont appelées « arrêts ». Lorsqu’elles sont rendues par un tribunal, elles sont appelées « jugements ».

B- La jurisprudence comme source de droit

a. L’évolution du rôle du juge

La jurisprudence était dès l’époque romaine, la première source de droit. Ainsi, dans l’ancien droit les juges rendaient ce qu’on appelait « arrêts de règlement », qui avaient une portée générale, étant susceptibles de s’appliquer à des affaires analogues postérieures.

De même, dans le droit musulman, la jurisprudence constitue une source importante de droit, puisque le juge était habilité à créer des règles de droit en l’absence d’un texte spécifique au cas présenté devant lui.

La réduction du rôle du juge était le produit de l’évolution historique du droit, et surtout avec la révolution française qui a institué le principe de la séparation des pouvoirs. Selon ce principe le juge n’a pas à intervenir dans la fonction législative, et son rôle se limite à appliquer le droit.

Le deuxième principe qui a affaibli le rôle du juge est celui de l’autorité relative de la chose jugée. Selon ce principe la décision du juge ne lie que les parties en litige. Cette évolution a minimisé la force obligatoire du précédent.

Toutefois, certains systèmes juridiques, gardent encore une place très importante à la jurisprudence. Il s’agit notamment des pays du Common law, comme la Grande-Bretagne, ont gardé le rôle créateur au juge. Ainsi, dans le droit anglais, chaque juge doit appliquer dans l’affaire qui lui est soumise, une règle de droit conforme aux décisions précédentes.

b. L’interdiction du déni de justice

Après l’institution du principe de la séparation des pouvoirs, le rôle du juge est devenu limité à la seule fonction d’application du droit, lequel est créé par le pouvoir législatif. Or, le législateur ne peut pas tout créer. Face à la diversité des situations, et à l’impossibilité de tout prévoir par le droit, le juge s’est trouvé dans plusieurs situations face à un vide juridique.

Etant donné qu’il est interdit au juge de dénier la justice- c'est-à-dire que le juge ne peut pas invoquer la lacune ou l’ambiguïté du droit pour refuser de juger- il s’est trouvé dans l’obligation de manier le droit et d’inventer des solutions pour des situations auxquelles le droit n’a pas donné de réponses. D’où le pouvoir créateur du juge.

Ainsi, en inventant des solutions, le juge crée un précédent, qu’on aura tendance à respecter. Autrement dit, si une nouvelle affaire semblable se présente devant lui, il appliquera la même solution. (Notamment en cassation, car elle est la dernière instance dans la hiérarchie judiciaire).

Ceci dit, le précédent constituera une source de droit pour le juge qui l’a prononcé, ainsi que pour d’autres juges. L’influence de ce jugement dépend largement de la nature de la juridiction qui l’a prononcé.

c. L’autorité de la jurisprudence

Il existe un courant qui pense que la jurisprudence ne constitue pas une source de droit, car les décisions de la justice n’ont pas le caractère général et abstrait. Ainsi, la jurisprudence n’a selon ce courant qu’une simple autorité.

En parallèle, il y a un deuxième courant qui estime que la jurisprudence constitue une source de droit, puisque le juge crée, dans certains cas le droit.

En synthèse on peut dire que la jurisprudence constitue une source subordonnée à la loi, mais en même temps qui peut l’enrichir.

Certes la jurisprudence n’est pas une source de droit dans le même rang que la loi. Mais l’expérience a montré que les juridictions se conforment généralement à la jurisprudence de la cour de cassation. Ainsi, lorsque cette dernière se prononce sur une affaire, dans laquelle il y a un cas d’ambiguïté de la loi, ou un problème d’interprétation de la loi, ou même un problème d’inadaptabilité de la loi, la solution choisie par la cour de cassation, aura une autorité incontestable.

Ainsi, la jurisprudence se transforme en un atelier de création continue du droit qui dépasse les limites théoriques de ses fonctions, et essaie même de concurrencer le rôle du législateur.

Faut-il préciser qu’une décision de justice peut se transformer en une règle de droit si la décision est formulée en des termes généraux et détachés de l’espèce, qu’elle se généralise et qu’elle devienne uniforme (ce qui est le cas pour la cour de cassation, qui ne se prononce pas sur les fait, mais sur l’application du droit).

En effet, certaines décisions dites « arrêts de principe », ont une autorité morale et font jurisprudence. Cette autorité morale peut influencer même le législateur qui adopterait cette solution en adoptant une loi sur la base de cette jurisprudence.

d. Limites de la jurisprudence

L’autorité morale de la jurisprudence n’est pas absolue. Cette autorité reste valable, tant que le législateur n’a pas adopté une loi qui lui est contraire.

Ainsi, la jurisprudence n’aura une influence qu’en cas d’ambiguïté, absence ou inadaptabilité claire du texte juridique. Or, si le législateur intervient pour combler cette lacune, et que son intervention soit contraire à l’orientation de la jurisprudence, cette dernière doit suivre dorénavant la position du législateur. Ainsi, la jurisprudence ne peut jouer qu’un rôle complémentaire à la loi.
Le combat entre la jurisprudence et la loi illustre la supériorité de celle-là sur celle-ci.

§3) La doctrine

La doctrine est l’ensemble des opinions juridiques émises par les spécialistes du droit.

Le rôle de la doctrine :

La doctrine a une force morale non négligeable :

1- Le rôle de la doctrine par rapport à la jurisprudence : Guider la jurisprudence.

2- Le rôle de la doctrine par rapport au législateur : Montrer les insuffisances du droit existant et proposer les solutions.

La faiblesse de la doctrine :

- Absence du caractère général et abstrait de la doctrine,
- Absence du caractère obligatoire de la doctrine.

Partie Chapitre II : Les droits subjectifs


Section I : La classification des droits subjectifs

Les droits subjectifs se divisent en deux catégories : les droits patrimoniaux (§2) et les droits extrapatrimoniaux (§3). Avant d’examiner ces deux composantes, on va présenter la notion de patrimoine (§1).

§1) La notion de patrimoine

Le patrimoine contient l’ensemble des droits et obligations de la personne juridique. Il est caractérisé par trois caractéristiques : il est universel + lié à la personne et ne contient que des droits pécuniaires.

a. Le caractère universel du patrimoine

Cela veut dire que l’ensemble de droits et obligations constituent un bloc, composé d’actifs et de passifs. Les actifs correspondent à tous les droits et éléments qui ont une valeur positive. Les passifs correspondent aux obligations et tous les éléments qui ont une valeur négative. Le principe de l’universalité fait que les actifs sont liés aux passifs. Les éléments actifs de la personne (ex. droit de propriété), sont liés aux éléments passifs, c'est-à-dire les créances ou dettes, ainsi les créanciers se font payer sur les actifs.

Ex. Un créancier hypothécaire a, en vertu du principe d’universalité, un droit sur l’ensemble des actifs.

De même en matière d’héritage, l’héritier recueille à la fois les actifs et les passifs. C'est-à-dire, il hérite les biens, mais aussi les dettes. Les ayants cause universel sont ceux qui héritent la totalité du patrimoine (actifs et passifs), alors que les ayants cause à titre particulier n’héritent qu’une partie du patrimoine (actifs et passifs) : ex. le 1/3, 1/8…etc.

b. Le patrimoine est lié à la personne

Ce principe est l’expression de la puissance juridique dont une personne se trouve investie comme telle. Ce principe implique que seules les personnes ont un patrimoine, et que cette personne ne peut avoir qu’un seule patrimoine.

Ainsi :
- Seules les personnes ont un patrimoine : Il ne peut y avoir de patrimoine sans le support d’une personne physique ou morale.
- De même que toute personne physique ou morale a nécessairement un patrimoine, même si son contenu est nul, car toute personne est apte d’avoir des droits et des obligations. Le patrimoine est lié à l’existence de la personne juridique,
- Une personne n’a qu’un seul patrimoine.

 En conséquence, le patrimoine ne se transmet pas entre vifs. Une personne vivante peut céder un élément de son patrimoine, mais pas sa totalité. Par contre le décès de la personne marque la transmission du patrimoine à son héritier.

c. Le patrimoine ne contient que des droits pécuniaires

C'est-à-dire des droits évaluables en argent, par opposition aux droits non pécuniaires, tels que le droit au nom, le droit à l’image…etc. L’idée que les droits sans valeur pécuniaire sont hors du patrimoine parce qu'ils ne peuvent être saisis par les créanciers. D’où la distinction entre droits patrimoniaux et droits extrapatrimoniaux.

§2) Les droits patrimoniaux

Ce sont les droits qui ont, en eux mêmes, une valeur pécuniaire. Ils font donc parties du patrimoine et sont dans le commerce juridique. Il existe trois catégories de droits patrimoniaux :

a. Les droits réels

Sont les droits qui portent directement sur une chose. C’est un droit opposable à tous. C’est donc un droit susceptible d’abandon. (ex. Droit de propriété).

b. Les droits personnels

Appelés aussi droits de créances. Ce sont des droits que détient le créancier (الدائن) contre un débiteur (المدين). Ils sont opposables simplement à des personnes déterminées : les droits personnels n’obligent pas les tiers.

Les droits réels sont limités: droits réels principaux et droits réels accessoires (article 12 code des droits réels) : C'est la loi qui, seule, est susceptible de créer les droits réels, de préciser les pouvoirs d'une personne sur une chose. Le rôle de la volonté est nul, il n'existe pas de droit réel en dehors d'une loi.
Les droits personnels ou de créance, sont infiniment variés. Grace au principe de la liberté contractuelle, on peut être obligé d’exécuter toutes sortes de prestations: obligation de faire (contrat de travail) de ne pas faire (voisinage, concurrence), de payer (vente), etc. Généralement, il s’agit d’un droit de faire, de ne pas faire ou encore de donner.

c. Les droits intellectuels

- Droit de propriété littéraire et artistique
- Droit de la propriété industrielle
RQ/ Il est à noter que les droits intellectuels ne sont pas totalement patrimoniaux, puisqu’ils comprennent des droits moraux.

Les caractéristiques des droits patrimoniaux :

Les droits patrimoniaux sont :

* Cessibles : Les droits patrimoniaux sont cessibles, car on peut les céder (vendre ou louer).
* Saisissables : peuvent être saisis (par un huissier)
* Transmissibles,
* Prescriptibles : Les droits patrimoniaux sont prescriptibles.

§2) Les droits extrapatrimoniaux

Les droits extrapatrimoniaux sont hors du patrimoine, donc non évaluables en termes d’argent et ne peuvent être vendus. Ils sont attachés à la personne et non susceptibles d’une évaluation pécuniaires. Ils sont hors du commerce juridique.

Il existe deux catégories de droits extrapatrimoniaux :

- Les droits publics extrapatrimoniaux : qui comprennent essentiellement les droits de l’homme et les libertés publiques…etc.

- Les droits privés extrapatrimoniaux : ils comprennent deux sous catégories.

- Les droits de la personnalité : droits relatifs à la reconnaissance de l’individu avec les autres, ainsi que sa reconnaissance par les autres. On trouve dans cette sous catégorie des droits tels que:

1. Le droit au respect physique : droit à son intégrité physique et à la vie,
2. Le droit au respect moral : ne pas porter atteinte à la considération des autres – sinon : diffamation), le droit à ne pas porter atteinte à la vie privée…

A l’inverse des droits patrimoniaux, les droits extrapatrimoniaux sont incessibles, intransmissibles, insaisissables et imprescriptibles.

Section II : La preuve des droits subjectifs

§1) Le droit subjectif : un droit qui doit être prouvé

Lorsqu’on porte plainte devant la justice contre une personne, il y a deux types d’allégations. D’abord, une allégation relative aux faits. (C’est à dire le plaideur prétend que certains faits ont eu lieu). Ensuite, il y a des allégations relatives au droit (c’est à dire que le plaideur revendique l’application de certains textes juridiques aux faits cités).

Contrairement au droit objectif, les droits subjectifs doivent être prouvés pour être établis. En effet, le droit objectif existe indépendamment de la volonté des parties en litige. Par contre, le droit subjectif, bien qu’il soit reconnu par le droit objectif, sa revendication nécessite l’existence de preuve d’une éventuelle violation : Un droit subjectif ne peut être reconnu par le juge qu’après avoir fourni les preuves de son existence.

Ainsi, la preuve d’un droit subjectif, se rapporte aux faits et non pas au droit. Car, on n’est pas censé devoir montrer au juge l’existence d’une règle juridique. Le droit se discute et ne se prouve pas, tandis que les faits doivent être prouvés, en cas de contestation.

Etant donné que le juge doit en principe connaître la règle de droit, les parties au litige doivent montrer la véracité des faits allégués, et l’applicabilité du droit objectif à ces faits, pour pouvoir conclure ainsi, la possibilité de bénéficier d’un quelconque droit subjectif.

§2) La charge de la preuve du droit subjectif

1 Le principe

La charge de la preuve incombe en principe au demandeur (à celui qui s’en prévaut). « La preuve de l’obligation incombe à celui qui s’en prévaut) (420 COC).
De même, l’article 1315 du code civil français dispose que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».

Mais le défendeur peut contester les faits allégués en prouvant que les revendications du demandeur sont non fondées. (Principe du contradictoire)

Ainsi, il faut distinguer entre deux grands types d’obligations : l’obligation de faire et l’obligation de ne pas faire.

S’agissant d’une obligation de faire : Ex. Dans une opération de vente, c’est le vendeur qui doit prouver qu’il a livré la marchandise, et l’acheteur doit prouver qu’il a payé le prix.

S’agissant d’une obligation de ne pas faire : Ex. L’acheteur d’un fond de commerce doit prouver que le vendeur ait violé l’obligation de non rétablissement (l’interdiction de la reprise d’une activité professionnelle antérieure). L’employeur doit prouver que son salarié a failli à l’obligation de non concurrence.

Ex. Celui qui a subi un dommage doit prouver que la personne qui a causé le dommage a violé l’obligation générale de ne pas nuire à autrui.

2 Exceptions

Il existe deux exceptions dans lesquelles il est inutile d’apporter la preuve. Il s’agit d’abord des cas de dispense de preuve en raison de la nature du fait à prouver ; ensuite le cas des présomptions.

1- Dispense de preuve en raison de la nature du fait à prouver

Ce qui est normal ou naturel n'a pas à être prouvé. Par exemple, il faudra prouver l'existence d'un contrat, mais pas que ce contrat est valable.

2- Les présomptions

Les présomptions sont les conséquences que le juge ou la loi tirent, d’un fait connu, à un fait inconnu. Il s’agit donc d’un mode de raisonnement par déduction, qui forge l’intime conviction du juge. C’est le moyen de preuve qui fait participer le plus le raisonnement du juge. Il existe deux types de présomptions : les présomptions légales et les présomptions de l’homme.

§3) Les moyens de preuve des droits subjectifs

La preuve est « tout ce qui persuade l'esprit d'une vérité ». Dès lors, on aurait pu admettre que tous les modes de preuve sont envisageables, quelles que soient les circonstances. Or, dans notre droit tous les moyens de preuve ne sont pas également admissibles. Dans certains cas, la preuve est libre, dans d’autres la preuve est légale.

Le système de la preuve légale domine lorsqu’il s’agit des actes juridiques ; tandis que le système de la preuve libre domine lorsqu’il s’agit de faits juridiques.

A- les sources des droits subjectifs actes juridiques / faits juridiques

La distinction entre les faits juridiques et les actes juridiques repose sur l’idée de la présence ou l’absence de la volonté de ceux qui créent le droit subjectif. Ainsi, l'acte de volonté par lequel une personne va modifier sa situation juridique, est un acte juridique. Sa situation juridique peut se modifier en dehors de sa volonté ou même contre sa volonté. Cette modification résulte alors de la survenance d'un fait juridique.

• L’acte juridique : L'acte juridique est une manifestation de volonté destinée à modifier une situation juridique ou à produire des effets de droit. Ces effets de droit sont la création, la transmission ou l'extinction d'un droit subjectif.
Lorsque l’acte juridique émane d’une seule volonté, on l’appelle acte unilatéral (exemple : l’occupation, l’abandon d’un droit, l’acte de testament, la reconnaissance d’un enfant naturel...etc.) Si l’acte unilatéral ne crée pas d’obligation à la charge d’un tiers, il crée en revanche une obligation à son profit et à la charge de l’auteur de l’acte.
Lorsqu’il émane de plusieurs volontés et entraine la modification de la situation juridique de plusieurs personnes, on m’appelle convention ou contrat.

• Le fait juridique : Il y a fait juridique lorsqu’un événement crée, transmet ou éteint un droit, sans qu'une personne ait voulu ce résultat.

Le fait juridique peut être un fait naturel (ex. un décès, une naissance…etc.), comme il peut être le fait de l’homme volontaire ou involontaire (ex. en commettant une maladresse on blesse quelqu’un). Dans ce type de fait, la personne n’a pas voulu réaliser l’évènement, ni produire les conséquences juridiques qui s’y rattachent.

La preuve de l’acte juridique est légale (déterminée par la loi), alors que la preuve du fait juridique est libre.

B- Les preuves parfaites et les preuves imparfaites

Les moyens de preuve des droits subjectifs se divisent en deux catégories. D’abord les moyens de preuve parfaits, ensuite les moyens de preuve imparfaits.

a. Les moyens de preuve parfaits

Les moyens de preuves parfaits sont au nombre de trois (3):

- L’écrit
- L’aveu
- Le serment décisoire

1. L’écrit ou preuve littérale

C’est l’instrument de preuve le plus important en matière civile. On distingue entre l’acte authentique et l’acte sous seing privé.

Ex. Selon l’article 473 du Code des Obligations et des Contrats (C.O.C), « Les conventions ou autres faits juridiques, ayant pour but de créer, de transférer, de modifier, ou d’éteindre des obligations ou des droits et excédant la somme de mille dinars, ne peuvent être prouvés par témoins, il doit en être passé un acte authentique ou sous seing privé ».

Faut-il souligner qu’il ne s’agit là que de règles de preuve. Cela ne concerne pas la validité de l’acte en question, qui n’est soumise à aucune condition de forme. Ainsi, l’écrit n’est pas dans ce cas, une condition de validité, mais une condition de preuve.

De même, il faut noter que cette règle ne concerne que les parties à une convention et ne concerne pas les tiers pour lesquels l’écrit n’est qu’un simple fait juridique. Ainsi, s’il s’agit pour eux de prouver un contrat auxquels ils sont étrangers, ils peuvent utiliser tous les moyens de preuve.

L’acte authentique : Est celui qui est effectué dans les formes légales par un officier public. (Ex. officier d’état civil, huissier notaire…).

Trois conditions sont requises pour que l’authenticité de l’acte soit reconnue :

1- L’écrit doit être dressé par un officier public ;
2- L’officier public doit être compétent ;
4- Les formalités prévues par la loi doivent être respectée.

La force de l’acte authentique est absolue : il est opposable vis à vis de tout le monde. L’acte authentique régulier est doté d’une force probante particulière. Il fait alors foi à l’égard des parties et des tiers, jusqu’à l’inscription de faux sur sa réalité et des constations de l’officier public. (ne peut être contré que par une procédure de l’inscription de faux).

En cas de non respect de l’une de ces conditions, l’acte authentique est alors, relégué au rang d’un simple acte sous seing privé (simple écriture privée).

L’acte sous seing privé : est un acte effectué par les parties elles-mêmes, sans la participation d’un témoin officiel. Il exige, simplement, que toute partie signe elle-même l’acte en question.

RQ/

- Le timbre ou le cachet ne peuvent substituer la signature ;
- L’illettré ne peut pas dresser un acte sous seing privé, il faut avoir le témoignage d’un officier public ;
- Un acte qui ne respecte pas les conditions de preuve, peut être considéré comme étant un simple commencement de preuve par écrit. Certains juges ont même retenu comme étant un écrit, constituant un commencement de preuve, les enregistrements de paroles sur un magnétophone ;

- Les copies peuvent avoir la même valeur que l’original si :

a. L’original a disparu ou n’a pas été gardé
b. La copie est une reproduction fidèle et durable de l’original
(Article 471 nouveau du COC)

2. L’aveu

L’aveu est la « reine des preuves » (notamment en matière pénale). Il est défini, comme étant la reconnaissance de l’acte ou du fait juridique, par la personne à qui on l’oppose.
Il faut distinguer entre l’aveu judiciaire et l’aveu extrajudiciaire. Seul le premier a une force probante, tandis que le second est considéré comme un simple témoignage qui ne lie pas le juge.

L’aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l’a fait. L’aveu judiciaire est soumis aux conditions suivantes :

- Il faut qu’il soit devant le juge

- Fait avec le libre consentement

- La capacité de celui qui a effectué l’aveu.

3. Le serment décisoire

Le serment peut être soit décisoire soit supplétoire. Il doit toujours être prêté personnellement et non par procureur (493 COC), par une personne capable (494 COC), et avec le libre consentement (506 COC), sur un fait personnel ou une connaissance d’un fait (art. 498 COC).

Définition du serment décisoire : Le serment décisoire est celui qu’une partie défère à l’autre pour en faire dépendre la décision du juge. Le serment est soumis aux conditions suivantes :

- Il peut être fait recours au serment décisoire, même s’il n’existe aucun autre moyen de preuve (art. 497 COC). En revanche le recours au serment décisoire oblige la renonciation à tout autre moyen. Ainsi, aucune preuve ne peut être admise contre le serment, sauf poursuites pénales pour faux serment (505 COC).

- Le serment doit être effectué dans des conditions tenant en compte la religion de la partie à laquelle on défère le serment. Exemple pour les musulmans celui qui va prêter serment doit jurer, le vendredi, dans une mosquée, ou dans un autre lieu de culte désigné par la partie qui le diffère, que sa version de la vérité est exacte (495 COC).

- Dans certains cas il est impossible de déféré le serment décisoire :

* Ex. Lorsqu’il s’agit d’une convention pour laquelle la loi exige un acte authentique ou la transcription ;
* Contre un fait, qu’un acte authentique déclare avoir eu lieu,
* Pour établir une obligation pour laquelle la loi refuse une action en justice pour des raisons d’ordre public ou morale…etc. (500 COC)…etc.

Lorsqu’on défère le serment décisoire à son adversaire, il y a deux attitudes possibles (503 COC):

- Soit que la personne à laquelle on défère le serment accepte de le prêter. Dans ce cas la question de la preuve est définitivement réglée. Le juge est alors lié par le serment et aucune autre preuve ne sera admise contre le serment, sauf les poursuites pénales pour faux serment.

- Soit que le défendeur refuse de prêter serment. Dans ce cas, il doit référer lui-même le serment au demandeur. Mais, cela ne suffit pas pour établir la véracité des faits invoqués par le demandeur. La décision du juge dépendra de l’attitude de cette personne. Si le demandeur accepte de prêter serment, la vérité sera admise selon sa version. S’il refuse de prêter serment le demandeur perdra définitivement le procès.


b. Les moyens de preuve imparfaits

Les moyens de preuve imparfaits sont les suivants :

- Le serment supplétoire
- Le témoignage, ou la preuve testimoniale,
- Les présomptions de l’homme

1. Le serment supplétoire ou le serment déféré d’office

Il s’agit d’une procédure par laquelle le juge peut déférer à l’une des parties le serment, pour en faire dépendre sa décision.

Selon l’article 508 du COC, « Le juge peut déférer le serment à l’une des parties ou même à toutes les deux pour en faire dépendre la décision de la cause, ou seulement pour déterminer le montant de la condamnation. Le serment supplétoire peut être déféré, soit sur un fait qui est personnel à la partie, soit sur la connaissance d’un fait ». Le serment sur la valeur de la chose demandé ne peut être déféré au demandeur que lorsqu’il est impossible de constater autrement cette valeur.

C’est un instrument de preuve imparfait, qui ne peut se suffire à lui-même. Il nécessite d’être accompagné d’autres preuves. L’intérêt du serment supplétoire, est de permettre au juge qui le défère (à l’une des parties en litige, ou à toutes les deux), de compléter les éléments de preuve qui lui sont présentés, et d’asseoir sa décision.

Contrairement au serment décisoire, « Le serment déféré d’office par le juge à l’une des parties ne peut être référé à l’autre » (art.509 COC). Dans tous les cas le serment supplétoire ne lie pas le juge et ne peut non plus servir la cause de celui qui l’a prêté ou celui qui a refusé de le prêter.

2. Le témoignage

C’est la déclaration faite par un tiers (personne qui ne fait pas partie au litige), sous serment, en justice, sur la demande de l’une des parties ou par le juge, au cours de la procédure judiciaire, par laquelle, cette personne atteste avoir vu ou entendu quelque chose.

Le témoignage peut revêtir la forme orale ou écrite. Il doit être fait devant le juge.

Qui peut témoigner ?

- Le témoin doit être neutre, et n’a aucun intérêt personnel dans l’affaire.
- Chaque personne est tenue d’apporter son concours à la justice en vue de la manifestation de la vérité.
- Un juge peut contraindre certaines personnes à apporter leur témoignage, sous peine d’être sanctionnées.
- Certaines personnes peuvent refuser de témoigner, telles que celles ayant un lien de parenté direct ou le conjoint.

Valeur probatoire du témoignage : Le témoignage (preuve testimoniale) reste un instrument de preuve imparfait, car il ne lie pas le juge. Il l’aide seulement à asseoir son intime conviction.

La preuve testimoniale n’est pas recevable dans certains cas, notamment, lorsque la valeur de l’obligation, objet du litige, dépasse mille dinars (Art. 473 et s). Par contre, la preuve testimoniale est recevable :

- Lorsqu’il y a un commencement de preuve par écrit.
- Lorsque la partie a perdu le titre qui constitue la preuve littérale de l’obligation, ou de la libération, en conséquence d’un cas fortuit, d’une force majeure, d’une soustraction frauduleuse (art. 478 COC).
- Lorsqu’il n’a pas été possible au créancier de se procurer une preuve littérale de l’obligation ; tel est le cas des obligations entre commerçants (art. 478 COC) .

3. Les présomptions de l’homme

La présomption est un mode de raisonnement juridique. On peut la définir comme étant des conséquences que la loi ou le juge tire d’un fait connu à un fait inconnu. Elles apportent une exception au principe selon lequel il incombe au demandeur de prouver en opérant un renversement de la charge de la preuve.

Il y a deux types de présomptions : les présomptions de fait et les présomptions légales.

a. Les présomptions de fait (ou présomption de l’homme)

Les présomptions de l’homme sont les conséquences que le juge tire d’un fait connu à un fait inconnu.

Ainsi, la présomption de l’homme est constituée à l’occasion du litige et invoquée par la partie qui en fait allusion : Au lieu de prouver le fait contesté, le demandeur se contente de donner un indice. A partir de cet indice connu, on déduira le fait inconnu, de sorte qu’il appartiendra à l’autre partie de prouver le contraire.

Ces indices peuvent être :

- Soit de constations matérielles
- Soit de déclarations de personnes
- Tout document
- L’attitude des parties
- Les résultats d’une expertise

En raison de leur gravité le législateur exige que ces présomptions soient « graves, précises et concordantes ». Selon l’article 486 du COC « Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi sont remises à la prudence du tribunal ; il ne doit admettre que des présomptions graves et précises ou bien nombreuses et concordantes ; la preuve contraire sera de droit et elle pourra être faite par tous moyens ».

Toutefois, l’article 487 du COC ajoute que « Les présomptions même graves, précises et concordantes, ne seront admises que si elles sont confirmées par serment de la partie qui les invoque ».

Cette procédure est propre aux présomptions de fait et non les présomptions légales.

Ex. art. 488 du COC « Celui qui possède de bonne foi une chose mobilière ou un ensemble de meubles est présumé avoir acquis cette chose régulièrement et d’une manière valable, sauf à celui qui allègue le contraire à le prouver.
N’est pas présumé de bonne foi celui qui savait ou devait savoir, au moment où il a reçu la chose, que celui dont il l’a reçue n’avait pas le droit d’en disposer ».

Rq/ L’aveu extrajudiciaire est un mode de preuve qui se rattache à la catégorie des présomptions du fait de l'homme

Il s’agit de : Tout aveu qui n'est pas émis devant le juge compétent au cours de l'instance dans laquelle le fait est en cause est un aveu extrajudiciaire. L'aveu extrajudiciaire n'a pas du tout la même force probante que l'aveu judiciaire. L'aveu extrajudiciaire ne lie pas le juge : Sa pertinence dépend entièrement de son appréciation et de son intime conviction.

b. Les présomptions légales

Sont des présomptions établies par la loi. Elles peuvent être définies comme étant les conséquences que la loi tire d’un fait connu à un fait inconnu.
Selon l’article 480 du code des obligations et des contrats « La présomption légale est celle qui est attachée par la loi à certains actes ou à certains faits.

Ex. la présomption de bonne foi : elle dispense tout individu de prouver sa bonne foi (article 558 du COC) .
Ex. présomption d’innocence

La force probante de la présomption légale :

Les présomptions légales, n’exigent pas le recours à d’autres instruments de preuve pour être acceptées par le juge. Selon l’article 485 du même code : « La présomption légale dispense de toute preuve celui au profit duquel elle existe. Nulle preuve n'est admise contre la présomption de la loi ».

La force probante de la présomption légale est variable selon qu’elle soit une présomption simple ou irréfragable.

• Les présomptions simples

La présomption simple, peut être combattue par la preuve contraire.
Ex. La présomption de bonne foi.

• Les présomptions irréfragables

Les présomptions dites « irréfragables » ou absolue sont rares. Elles ne peuvent être contestées en prouvant le contraire. C'est-à-dire la loi interdit au demandeur d’apporter une preuve contraire.

Ex. l’adage nul n’est censé ignorer la loi.

RQ : En raison de la perfection de la présomption légale, seules les présomptions de l’homme sont considérées comme preuves imparfaites.

Troisième partie : L’application du droit

Chapitre I : L’entrée en vigueur de la règle juridique

La vigueur de la règle juridique est la situation qui commence à exister à partir de la signature ou la promulgation et la publication de la règle jusqu’à son abrogation, pendant laquelle la règle de droit jouit d’une force obligatoire.

L’idée de la force obligatoire de la règle juridique pose des questions quant aux conditions de l’entrée en vigueur de la loi, ainsi qu’aux problèmes de conflits de lois.

Section I : Les conditions d’entrée en vigueur de la loi

Lorsqu’une loi est définitivement adoptée par le Parlement, elle ne s’impose aux sujets de droit qu’après l’achèvement de deux étapes essentielles : la promulgation et la publication.

§1) La promulgation de la loi

Déf. : La promulgation est un acte qui relève des compétences du Chef de l’Etat, par lequel il atteste que la loi a bel et bien été adoptée par l’organe compétent, selon les procédures et modalités requises, et qu’elle devra, en conséquence, être obéie à compter de son entrée en vigueur.

La promulgation est effectuée par voie de décret (décret de promulgation), contresigné par le 1er ministre, et éventuellement par les ministres compétents.

Il est à noter que les décrets et arrêtés, entrent en vigueur simplement par la signature de l’autorité compétente (Pdt. Rép., ministres…), et la publication. Tandis que les lois entrent en vigueur par la promulgation et la publication.

La promulgation intervient dans un délai maximum de 15 jours à partir de la date de l’adoption définitive du texte de la loi par le Parlement.

§2) La publication

Déf. : La publication est l’insertion dans un exemplaire du Journal Officiel de la République Tunisienne (JORT), du texte de loi dans l’ordre juridique positif.

Une loi qui est régulièrement adoptée et promulguée, mais qui n’a pas été publiée, est dépourvue de force obligatoire.

Il faut signaler à cet égard, que la publication ne rend pas la loi immédiatement obligatoire, car il faut l’écoulement préalable d’un certain délai pour permettre aux citoyens de s’y informer :

Le principe : entrée en vigueur après 5 jours francs.

Exception :
- Entrée en vigueur immédiate, pour certains cas tels que la déclaration de l’Etat d’urgence.
- Entrée en vigueur retardée (ex. Code du statut personnel).
Rq/ Les décrets, les arrêtés et les lois sont soumis aux mêmes règles.


Section II : Les conséquences liées à l’entrée en vigueur de la loi

L’entrée en vigueur de la règle juridique, a comme conséquence essentielle, d’attribuer au texte adopté une force obligatoire. Ainsi, la règle devient applicable d’une manière égale vis-à-vis de tous.

§1) Les limites de la force obligatoire de la règle de droit

La règle de droit demeure obligatoire jusqu’à son abrogation. De même la maxime, nul n’est censé ignorer la loi porte des limites.

a. L’abrogation de la règle juridique

Déf. : L’abrogation est l’acte par lequel on met fin à la force obligatoire d’une règle de droit, marquant ainsi son abolition.

Caractéristiques de l’abrogation :

- Autorité de l’abrogation : la même autorité de création de la règle juridique, ou une autorité qui lui est supérieure. (consécration du principe de la hiérarchie des normes).

- Effet de l’abrogation : met fin aux effets de la règle juridique pour l’avenir.

- Les formes de l’abrogation : elle peut être expresse (directe), ou tacite (indirecte).

Rq/ L’abrogation tacite résulte de l’incompatibilité entre une disposition ancienne et une autre disposition nouvelle, de même type ou qui lui est supérieure. (Une disposition générale n’abroge pas une disposition spéciale, mais une loi spéciale peut abroger une loi générale dans son domaine particulier).

b. La mise à l’écart de la règle juridique

Il existe trois principales situations dans lesquelles il est possible de mettre à l’écart une règle juridique.

1- La dispense : il y a dispense lorsque le législateur permet qu’un individu, soit soustrait à une règle juridique, quoique l’édiction soit faite pour tous.
(Ex. Le juge peut autoriser des mariages rendus normalement impossibles pour l’âge : pour protéger l’honneur d’une fille par exemple).

2- Le privilège : il y a privilège lorsque se trouve concédé à une personne ou un groupe de personnes, un avantage ou faculté dont les membres de la communauté sont normalement exclus. (ex. le privilège fiscal pour les non résidents).

3- L’immunité : exception prévue par la loi, interdisant la condamnation d’une personne qui se trouve dans une situation bien déterminée en raison de son statut spécifique. (ex. immunité parlementaire).


Chapitre II : Le conflit des lois dans le temps

Le problème posé :

Le problème se pose lorsque :
-  Une situation juridique est apparue avant la nouvelle loi +
- Cette situation a déjà produit certaines conséquences dans la vie pratique et continue à se développer et produire des effets, après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.

Rq : La situation juridique connaît outre la phase de création et la phase d’extinction, une phase intermédiaire où elle produit des effets.

Il s’agit de tracer une ligne séparatrice entre la limite de la force obligatoire de l’ancienne loi et celle de la nouvelle loi.

Principe général :

La nouvelle loi ne doit pas s’appliquer, en principe, au passé : ne peut pas revenir sur le passé (pas d’application rétroactive : principe de la non rétroactivité)= c’est-à-dire, la loi nouvelle ne peut avoir qu’un effet immédiat : sur le présent et le futur.

Section I : principe de non rétroactivité
Ce principe s’applique pour les faits et actes antérieures à la nouvelle loi : Pour ce qui est de la période passé de la situation juridique.

Pour cette situation le principe qui s’applique est celui de la non-rétroactivité. L’application de ce principe en matière pénale diffère de celle dans les autres matières.

Son but : Justification du principe :

- Garantir en matière pénale, que la peine applicable ne peut être appliquée, qu’en vertu d’un texte antérieur au fait incriminé.
- Assurer la sécurité des personnes et de leurs relations juridiques : la nouvelle loi ne doit concerner que l’avenir.
- Sans ce principe il n’y aura pas de confiance dans les lois.

§1) En matière pénale :

Ce principe est affirmé avec beaucoup d’importance dans la Constitution elle même (article 13), car il touche à des droits relatifs à l’intégrité physique des personnes.

Art. 13 de la Constitution : « La peine est personnelle et ne peut être prononcée qu’en vertu d’une loi antérieure au fait punissable ».

Exceptions:

-  Cas d’une loi pénale plus douce (Favorable à l’accusé).
- Cas des crimes grave contre la paix et la sécurité de l’humanité. (Essentiellement : crimes de guerre, crime de génocide, crime contre l’humanité et crime d’agression).
-  Cas des lois interprétatives ou loi de forme.
- Cas des lois expressément rétroactives, qui viennent pour valider des actes antérieurs nuls : elles produisent des effets rétroactifs (ex : la loi d’amnistie).

§2) En dehors de la matière pénale : en matière civile

Le même principe s’applique (la non rétroactivité), mais avec un peu plus de souplesse. Car dans les autres matières, il n’y a pas question de toucher à l’intégrité physique des personnes. C’est pourquoi ce principe n’est pas affirmé par la Constitution, mais par les codes juridiques seulement. Or, les codes ne peuvent pas avoir une valeur générale, c’est pourquoi la jurisprudence est intervenue pour donner une valeur générale à ce principe.

Or, cela n’empêche que les exceptions ne peuvent intervenir que pour des raisons d’une extrême importance (ex. cas où l’Etat veut mener une politique de changement radical, économique ou social ou autre).
Selon M.Carbonnier : « Sans la rétroactivité, on ne saurait jamais aboli l’esclavage, ni les droits féodaux » :

Les exceptions :

- Lois expressément rétroactives, ou lois indiquant un changement radical (ex. Décret n° 2009-2611 du 14 septembre 2009, complétant le décret n° 98-2248 du 16 novembre 1998 fixant les lieux affectés à l’usage collectif dans lesquels il est interdit de fumer).
- Lois interprétatives, ou loi de forme (ex. loi de procédure).

Section II : principe de l’effet immédiat de la nouvelle loi (Pour ce qui est de la période future de la situation juridique)

§1) Le principe

Ce principe s’applique pour les actes et faits postérieurs à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi + aux effets à venir des situations juridiques préexistantes.

Le problème se pose donc, lorsqu’il s’agit d’une situation juridique qui a commencé à produire ses effets dans le passé et continue à exister

§2) L’exception du principe.

1-     Cas du domaine ordinaire (en matière contractuelle):

En matière contractuelle, là où les situations juridiques naissent de l’accord de la volonté des parties et les intérêts en cause ne sont pas des intérêts d’ordre public. Le législateur a permis de maintenir l’application de la loi ancienne aux effets à venir des contrats conclus à son époque, et ce dans le cadre du respect de la prévision des parties, ainsi que la sauvegarde de la stabilité contractuelle.

= C’est le principe général de « la survie de la loi ancienne pour les contrats en cours ».

2- Cas du domaine exceptionnel : il s’agit des situations procédurales qui ont déjà donné lieu à une décision sur le fond (c.à.d. relative aux conditions intrinsèques d’exercice, de l’acquisition ou la perte d’un droit subjectif), avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi : les lois de forme.

§3) L’exception de l’exception

Le législateur peut en matière contractuelle imposer le principe de l’application immédiate de la loi nouvelle et ce dans le cas où il y a lieu de l’application d’une politique de changement radical économique et social, qui implique la nécessité du respect par tout le monde de la nouvelle loi.

Cette loi porte désormais un caractère impératif. Dans ce cas les intérêts collectifs priment les intérêts individuels.

Chapitre III: L’organisation judiciaire

La justice est considérée comme un service public assuré par l’Etat, à travers lequel il exerce le monopole de la contrainte, et donc sa souveraineté. Ceci exclue en principe toute idée de justice privée.

Il existe, toutefois, une exception partielle, à savoir l’arbitrage. En effet, le recours à l’arbitrage, surtout dans les relations commerciales, constitue une atteinte au monopole étatique sur l’appareil juridictionnel.

Il est fait recours à l’arbitrage, en raison de ses avantages liés à la rapidité, la technicité, et la discrétion…Cependant l’exception de l’arbitrage est limitée, puisque l’arbitrage ne peut pas résoudre les litiges contre la loi. Ensuite, la sentence arbitrale ne peut devenir exécutoire qu’après contrôle judiciaire. C'est-à-dire étatique.

Section I : Les principes régissant les juridictions de l’ordre judiciaire

§1) La distinction entre les juridictions de droit commun et les juridictions d’exception

Les juridictions de droit commun sont celles qui ont une compétence de principe pour juger de tout litige. Autrement dit, elles n’ont pas besoin d’une loi spéciale pour devenir compétente dans une affaire déterminée. (ex. le tribunal cantonal, le tribunal de première instance…).

L’article 40 du C.P.C.C. (Code des procédures civiles et commerciales) : « Le tribunal de première instance connaît en premier ressort de toutes les actions sauf dispositions contraires expresses de la loi ».

Les juridictions d’exception, ont leur compétence limitée par la loi qui les a institués. Elles ont un caractère exceptionnel, c'est-à-dire, dérogatoire. Ex. le conseil des prud’hommes, et le tribunal immobilier.

Les juridictions de droit commun jouissent de ce qu’on appelle « la plénitude de juridiction », ou la « plénitude de compétence ». C'est-à-dire, leur compétence peut s’étendre au-delà des limites légales, pour statuer sur des questions incidentes, qui n’entrent pas en principe dans leur compétence.

(Ex. le tribunal de première instance peut en plus des questions qui entrent dans sa compétence prononcer une condamnation à des dommages intérêts qui, en raison du faible montant, entrent sous la compétence du tribunal cantonal.

Cette caractéristique est limitée aux juridictions de droit commun. Les juridictions d’exception, en raison du caractère rigoureusement limité de leurs compétences, ne peuvent avoir la plénitude de compétence.

Par ailleurs, dans certains cas la loi donne une « compétence exclusive » pour certaines juridictions sur certaines questions. Si une partie en litige estime que la question examinée par le tribunal fait partie de la compétence exclusive d’un autre tribunal, il s’agirait, dans ce cas, d’une « question préjudicielle ». Une question préjudicielle doit être tranchée au préalable, avant d’examiner la demande de fond. Ainsi, le juge peut, soit juger qu’il est compétent et dans ce cas il passe ensuite à l’examen de la question de fond ; soit juger qu’il est incompétent (surseoir à statuer) et renvoyer les partie à la juridiction compétente.

§2) La distinction entre la compétence d’attribution et la compétence territoriale

La compétence d’attribution est un critère de compétence juridictionnelle, basé sur la nature des rapports juridiques en cause, leur objet, et leur importance. Elle est appelée aussi compétence ratione materiae.

Par exemple, l’article 39 du C.P.C.C. dispose que « le juge cantonal connaît en premier ressort jusqu’à sept mille dinars, en matière civile… ».

Autrement dit, l’article 39 a attribué au tribunal cantonal, un titre de compétence pour les affaires dont le montant ne dépassant pas sept mille dinars. Ainsi, cet article base la compétence du tribunal cantonal sur le critère de l’importance du litige.

Pour ce qui concerne la compétence territoriale, ou ratione loci, elle base la compétence juridictionnelle, non pas sur la nature ou l’importance du litige, mais plutôt sur la base de sa localisation géographique, et son rattachement à un territoire quelconque.

L’intérêt pratique de cette règle réside dans le fait que lorsqu’on ne respecte pas une règle de compétence ratione materiae, on est devant un cas d’incompétence absolue. Car il s’agirait d’une violation d’une règle d’ordre public. Autrement dit, la cour ne peut pas se déclarer compétente même avec l’accord des parties au litige.

Par contre, lorsqu’on ne respecte pas une règle de compétence ratione loci, il s’agirait d’un cas d’incompétence relative. C'est-à-dire que les parties peuvent se mettre d’accord sur la compétence d’une juridiction qui ne se trouve pas forcément dont le lieu de localisation de principe.

§3) Le principe de double degré de juridiction

Le principe de double degré de juridiction permet à celui qui n’a pas obtenu satisfaction dans un premier degré de juridiction d’interjeter appel, afin d’obtenir ses droits.

RQ/Chaque juge est indépendant dans ses jugements, n’est soumis à aucune autre autorité. Il a toute la liberté de statuer comme il l’entend quelque soit son degré.

Chaque degré de juridiction est composé de différentes chambres : civile, commerciale, correctionnelle, criminelle…et chacune est dirigée par un Président. Le premier Président est celui qui préside l’ensemble de la Cour et veille sur la bonne administration de la justice.

Section II : L’organisation hiérarchisée des juridictions de l’ordre judiciaire

L’organisation juridictionnelle diffère selon qu’on est devant un cas de juridiction de droit commun (§1) ou un cas de juridiction spécialisée (§2), en parallèle il y a une autre catégorie de juridiction de droit public (§3). 

§1) Les juridictions de droit commun (non spécialisées).

L’organisation des juridictions non spécialisées (de droit privé) est basée sur une hiérarchie dans l’ordre et comme suit, de bas en haut :

- Le Tribunal Cantonal,
- Tribunal de première instance,
- La Cour d’appel,
- La Cour de cassation.

A- Le tribunal cantonal :

Créé depuis 1938 en Tunisie, son objectif est d’offrir une justice rapide et proche des justiciables (elle couvre l’ensemble du territoire : dans la circonscription d’un tribunal de première instance peut se trouver plusieurs tribunaux cantonaux).

- Composition : Il est composé d’un seul juge (juge unique), il n’y a pas de ministère public (النيابة العمومية), et le ministère d’un avocat n’est pas obligatoire (نيابة المحامي). Le tribunal cantonal rend des décisions appelées « jugement ».

- Compétence : Le tribunal cantonal a une compétence générale mais non exclusive : il est compétent dans les « petites affaire » relatives aux actions personnelle (الدعاوي الشخصية), dont le montant ne dépassant pas sept mille dinars (7,000,000 Dt).

Il a une compétence exclusive dans :

a. Les affaires relatives aux demandes en pension alimentaire.

b. Les actions possessoires (دعاوى الحوز).


Il a une compétence résiduelle dans les ordonnances en référé (الأحكام الإستعجالية).

Ex. en matière de saisie conservatoire (العـقـلة التحفظية), si la somme, objet de la saisie ne dépasse pas sa compétence.

Par ailleurs, selon l’article 213 C.P.C.C., le tribunal cantonal est aussi compétent pour prononcer des ordonnances sur requête (الأذون على المطالب) . Ainsi, que dans les litiges individuels de travail lorsqu’il n’existe de conseils de prud’hommes dans la circonscription.

B- Le tribunal de première instance :

Le tribunal de première instance comporte deux juridictions :

- La juridiction du tribunal proprement dite,
- La juridiction du Président du Tribunal.

Composition :

- Contrairement au tribunal cantonal, le tribunal de 1ère instance statue en formation collégiale (Pdt+deux conseillers). Le tribunal de première instance rend des décisions appelées « jugement ».

Compétence :

Il a une compétence générale, sauf ce qui a été exclu par texte spécifique. Le tribunal de 1ère instance joue un double rôle :

- D’une part, il examine en premier ressort, en tant que juridiction de premier degré pour les questions qui ne relève pas de la compétence d’une autre juridiction,

- D’autre part, il constitue une juridiction d’appel, et examine en dernier ressort les jugements qui ont été rendus par une autre juridiction inférieure (ex. appel des jugements du tribunal cantonal).
Sa compétence s’étend aux questions dont le montant du litige est supérieur à sept mille dinars (7,000,000 Dt). (Art. 39 C.P.C.C.)

Il est à noter que le Président du Tribunal de première instance est compétent pour les questions relatives aux : ordonnances de référé (الأحكام الإستعجالية) et les ordonnances sur requête (الأذون على المطالب).

C- La Cour d’appel :

C’est la juridiction de droit commun de second degré. Sauf les cas ou le tribunal de première instance statue en tant que juridiction d’appel, la Cour d’appel joue, en principe, le rôle de juridiction d’appel.


Composition : La cour d’appel est composée d’un Président, de deux conseillers et d’un greffier. La cour d’appel rend des décisions appelées « arrêts ». Ces arrêts sont toujours rendus en dernier ressort.

Compétence : Selon l’article 41 du C.P.C.C., la cour d’appel est compétente essentiellement dans :

- L’appel des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux de première instance de leur circonscription ;

- L’appel des ordonnances de référé rendues par le Président du tribunal de première instance ainsi que les injonctions à payer;

D- La cour de cassation :

La cour de cassation est la plus haute instance dans la hiérarchie des juridictions de droit commun. Elle ne constitue pas un troisième degré de juridiction, vu la particularité de sa compétence.

Composition :

La cour de cassation est composée d’un Premier Président, de Présidents de chambres et de conseillers. Elle est divisée en plusieurs chambres civiles et criminelles.
Compétence :

- La cour de cassation ne fait pas un réexamen de l’affaire, mais elle contrôle la bonne application du droit. Autrement dit, elle ne statue pas sur les faits, mais seulement sur la bonne application du droit.
- La cour de cassation examine donc les pourvois en cassation. Elle n’a le choix qu’entre deux solutions : soit accepter le pourvoi et anéantir la décision attaquée, soit rejeter le pourvoi et confirmer la décision attaquée.

Dans le cas où le pourvoi est accepté la cour renvoie les parties devant la «juridiction de renvoi », pour réexaminer l’affaire.

§2) Les juridictions spéciales : ex. le tribunal immobilier

Les juridictions spéciales en Tunisie comportent plusieurs juridictions, telles que le conseil des prud’hommes, le Tribunal immobilier, le tribunal militaire…etc.

Le tribunal immobilier :

Créé depuis 1885. Il a son siège principal à Tunis, et des sièges auxiliaires dans les régions (15 sièges).

Composition :

Il est composé soit de cinq magistrats, soit de trois si aucune opposition n’est faite.

Compétence :

- Immatriculer les immeubles (leur donner un titre foncier) (تسجيل العقارات) ;
- Mise à jour des titres fonciers ;
- Demande de révision et de rectification des jugements ;
- Recours contre les décisions des commissions régionales de mise à jour des titres ou des décisions du conservateur de la propriété foncière.

La décision du tribunal immobilier est définitive, et n’est susceptible d’aucun recours, même devant la cour de cassation.

***

Rq : Les juridictions de droit commun citées ci-dessus, sont celles qui appliquent le droit privé. Il existe d’autres juridictions qui appliquent le droit public, à savoir les juridictions du Conseil d’Etat : c'est-à-dire le Tribunal administratif et la Cour des comptes.

§3) Les juridiction de droit public : le Tribunal administratif et la Cour des comptes

A- Le tribunal administratif

Il est créé et organisé par la loi n° 72-40 du 1 juin 1972. Rattaché au premier ministère, il a son siège à Tunis. Il est compétent pour statuer dans les litiges mettant en cause l’administration et les pouvoirs publics pour excès de pouvoirs. Il joue également un rôle de conseil pour l’administration, en donnant des avis consultatifs.

B- La Cour des comptes

La Cour des comptes est organisée par la loi n° 1968 - 8 du 8 mars 1968. Elle est rattachée au premier ministère est a son siège à Tunis. Elle examine les comptes et la gestion de l’Etat, des collectivités locales, des établissements publics a caractère industriel et commercial ainsi que tous organismes quelle que soit leur dénomination dans lesquels l'état, les régions et les communes détiennent une participation à leur capital.

La cour de discipline financière est créée par la loi n° 85-74 du 20 juillet 1985 qui a compétence pour juger les auteurs des fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat, des établissements publics à caractère administratif ou des collectivités locales.

2 commentaires:

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